Entre sa médina et le Corinthia, un mur, enfin une muraille, je m'explique...
BAB AL-JEDID Au pied des murailles puniques de la médina de Tripoli, sous un toit de jonc où filtre le soleil par lames poussiéreuses, sur une chaise de plastique blanc qui flaire bon la mondialisation, des retraités (le vrai sens du mot “retraite”) collent leurs yeux à deux doigts d'une feuille pour y inscrire les scores d'une énième partie de carte. A quelques pas de là, de petits marchés improvisés (photo) disparaissent en un clin d'oeil à l'arrivée des policiers. Plus une trace des téléphones portables et des bouteilles de parfums que l'on utilise ici avec la même générosité.
La muraille entamée par le vent, la pluie et le temps offre des nids de luxe aux oiseaux. Les escaliers qui mènent à son sommet servent aussi de pissoirs pour les chalands et de plateforme à photographie pour les touristes qui se tiennent le nez en redescendant. Près des murailles, deux hommes se battent. Il n'y a pas de théâtre à Tripoli, alors les gens s'arrêtent et regardent deux hommes se battre. L'un tombe sur une montagne de sandales en plastiques. Tout le monde rit. C'est la fin du spectacle. Après un temps, le spectacle reprend, sous une autre allure : une femme à la démarche aussi ample que ses vêtements sont exigus.
... de l'autre côté de la muraille se dresse le Corinthia, l'unique cinq étoiles du pays....
CORINTHIA Sur un balcon, une violoniste ukrainienne et une pianiste libyenne meublent un silence feutré qui ne s'entendrait pas, à coup sûr, avec Bab al-Jedid. Autour de la table, sur des chaises en velours, trois autres Helvètes et un ami libyen. Liliane Pescini (tout à droite), Tessinoise responsable des visas à l'ambassade, assistait la veille à un défilé de mode, ici, au Corinthia, un défilé qui eut deux heures de retard à cause d'une invitée surprise, la princesse de Monaco. Eliane Kiener (à sa gauche), Lucernoise travaille pour le Haut Commisariat des Nations Unies pour les Réfugiés (la Libye n'a pas ratifié la convention sur les réfugiés). Marc Sahli (tout à gauche) que je remercie pour le festin et le Forgeron harmonieux de Haendel qu'il m'a fait découvrir au piano.
Entre la médina et le Corinthia, entre les chaises en plastique et celles en velours, Tarablous.