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  • Cenosillicaphobie

    Il est des mots qui facilitent la vie. Voyez plutôt.

    Vous vous réveillez. Votre premier réflexe est de scroller sur votre téléphone, et on vous le reproche. La faute à votre «nomophobie» (peur d'être séparé de son smartphone). Vous maquiller? Vous raser? Pas besoin, il suffit d’apprendre un mot : «cataptophobie» (peur des miroirs). Vous mangez vos tartines, votre partenaire vous propose un fruit, semblant ignorer votre «carpophobie» (peur des fruits). Mais lorsque cette même personne vous fait remarquer que c’est son anniversaire – ouïe – et qu’une fleur eût été… vous glissez le mot «antophobie» (peur des fleurs), ajoutez «gamétophobie» (peur du mariage), «tocophobie» (peur de l’enfantement), et malgré votre «anuptaphobie» (peur de rester célibataire), courageusement, vous filez.

    Même pour un étage, vous prenez l’ascenseur ; «climacophobie» (peur des escaliers). S’il pleuvait, vous retourneriez illico au lit ; «ombrophobie» (peur de la pluie). Il fait beau, vous êtes un fervent défenseur de la mobilité douce, mais on vous a hélas diagnostiqué une rarissime «basophobie» (peur de la marche). On vous refuse également le train ­– «sidérodromophobie» (peur du rail) – et le métro – «stasophobie» (peur de rester debout). Ne reste que la voiture.

    Vous arrivez au travail, en retard, comme il se doit ; «chronomentrophobie» (peur des horloges). Si les dossiers demandés ne sont pas finalisés, c’est à cause de cette satanée phobie administrative. Ce pourrait être pire, l’entreprise est saturée d’«ergophobes» (peur du travail) et de «kopophobes» (peur de la fatigue).

    Pour le repas de midi, vous déclinez l’invitation à la cafétéria ; les collègues connaissent la gravité de votre «géniophobie» (peur du bavardage).

    Vous faites donc encore quelques heures de bureau, pas trop, vous devez être parti avant quatre heures, à cause de votre «tétraphobie» (peur du chiffre 4) : juste le temps d’anticiper les activités du week-end. Hélas pas moyen de débourser 160 francs pour deux places au Cirque Knie, vous êtes «coulrophobe» (peur des clowns). Pas moyen non plus de rejoindre les parents – «syngénésophobie» (phobie de la famille) –, pire, les beaux-parents – «penthéraphobie» (peur des belles-mères).

    Vous serez condamné à fêter avec les amis, de préférence toute la nuit, puisque vous êtes «photophobe» (peur de la lumière du jour). Heureusement, vous n’êtes pas «méthyphobe»  (peur de perdre le contrôle en buvant de l'alcool). Vous remerciez déjà celles et ceux qui sauront prévenir votre «cenosillicaphobie» (peur du verre vide).